lundi 25 juin 2012

Mongolie samedi 16 juin 2012


AVERTISSEMENT
Il est bien délicat de témoigner d'une mission de chirurgie des brûlés. Ne pas illustrer notre difficile travail pourrait être trompeur, mais les photos de brûlures sont pénibles à regarder. Malgré mes efforts de retenue dans ce domaine, il est inévitable que certaines images puissent vous paraître choquantes. Elles ne sont que l'illustration de la triste réalité.




Débarquement à Ulan Baatar, il est 6 h 45, heure locale. Formalités de police et rassemblement de chariots pour récupérer nos 19 sacs et cartons confondus. Le tapis roulant démarre, nous sommes tous à l'affût. Delphine pique un sac qu'elle croit être à moi et qui appartient à une jeune fille qui se précipite pour se l'approprier. Les sacs noirs succèdent aux sacs noirs et font le tour du manège. Fin de la livraison des bagages, force est de constater que les nôtres n'y sont pas. Par respect pour mon chef chéri, je ne dis pas un mot sur les bagages prioritaires et le rush... Saran, notre  interprète, récupérée dans le hall d'accueil avec Battorgil, le directeur de l'hôpital, vient nous aider pour les réclamations. Résumé de l'affaire : mes sacs sont à Berlin ... ben ouais ! C'est pas du tout la peine de rire... et devraient arriver demain par un vol de la MIAT, le reste ne sera là que lundi par le prochain vol d'Aeroflot.
Battorgil qui a anticipé notre arrivée prévue avec trois tonnes de matériel, est venu avec une ambulance pour tout transporter. Et c'est finalement toutes sirènes hurlantes que l'ambulance, chargée d'une partie de l'équipe, quitte en urgence le parking de l'aéroport, direction l'hôtel, une vraie série américaine. Les autres suivent en voiture. Notre hôtel, Gobi Complex, est situé loin du centre ville, à proximité de l'hôpital de traumato où nous pouvons nous rendre à pied. C'est un lieu un peu kitsch, mais confortable et le petit déjeuner que l'on nous sert à l'arrivée est le bienvenu. Certains démarrent à la bière, pourquoi pas... Il est vrai qu'avec la fatigue et le décalage horaire, on ne sait plus très bien où l'on en est.
Douche, petite sieste et départ à 14 h pour l'hôpital où nous retrouvons Khishgee, la chirurgien responsable du service des brûlés, qui vient de passer un mois à Lyon, pour se former, dans le service de Delphine.


Khishgee



L'hôpital des brûlés où nous travaillons habituellement, a déménagé la semaine dernière sur l'hôpital de traumatologie car il va être détruit et totalement reconstruit : bâtiment moderne et plus grand, service d'urgences et de réanimation, locaux adaptés à cette pathologie spécifique. Jacques est venu les aider à préparer cet ambitieux projet qui devrait aboutir dans trois ou quatre ans.

L'hôpital de traumatologie


Les patients nous attendent et défilent pour la consultation. Nous en voyons une trentaine, en majorité des enfants présentant pour la plupart des séquelles de brûlures de gravité variable. Mes sacs étant ... à Berlin ou ailleurs ... je ne peux pas, à mon grand regret, commencer la distribution de peluches; ce sera pour demain.





Visite dans le service où quelques enfants vont être opérés cette semaine. Brûlures aiguës ou séquellaires, enfants qui dorment ou se rassurent accrochés au sein de leur mère, sourires échangés, regards partagés, gold standard d'une mission où chacun est venu pour s'investir à fond.
La réanimation est le domaine d'une jeune femme chirurgien, effacée et discrète. Elle règne sur ce petit royaume où la prise en charge des patients a fait un bond impressionnant. Il y a là un petit de 10 mois, tombé il y a quatre jours dans une bassine d'eau bouillante, brûlé à 60 %. Il pourrait être mort, il vit, perfusé par un cathéter sous clavier, sous morphine à la seringue électrique, prise en charge exceptionnelle dans ces conditions de travail quelque peu précaires. Jacques, spécialiste en réa brûlés, est impressionné. Moi aussi, je dois dire et je n'arrive pas à détacher mes yeux de ce petit visage rond, emmaillotté de bandes blanches qui se calme lorsque sa maman se couche presque sur lui pour lui donner le sein.
Dans le lit d'à côté, un homme jeune très grièvement brûlé dans un incendie, respire difficilement. L'odeur nauséabonde de l'infection plane au-dessus de lui tandis que la mort, tapie en embuscade, rode autour de ses futures proies que l'équipe soignante s'acharne à maintenir en vie et à ne pas lâcher. Nous quittons la réa, il mourra dans la nuit.



Dans la chambre d'à côté, un petit garçon de trois ans est prostré, le regard fixe, totalement vide. Il ne bouge pas, il ne pleure pas, il ne crie pas. Écrasé par sa douleur, enfermé avec elle dans son corps mutilé, il présente une atonie psycho-motrice. Celui que les médecins croient être un enfant sage, est en fait un enfant en danger qui ne manifeste plus rien et je me sens là encore en grand désarroi, sentiment d'impuissance, d'inutilité absolue.




Retour dans le bureau de Khishgee pour faire le programme de demain, cinq patients. Nous opérerons dans un seul bloc où se trouvent deux tables, joyeux bordel annoncé.

La fille de Didier et son ami, qui bossent en Mongolie pour des ONG, nous rejoignent à l'hôtel. Nous dînons tous ensemble dans un restaurant indien où la Chinggin, la bière locale, coule à flots. Bonne soirée et bonne nuit.









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